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François, Pape d’une Eglise appelée au service

A l’occasion de la fête des saints Pierre et Paul, le Pape François remettait le palium aux nouveaux archevêques nommés cette année. Cette écharpe de laine portée lors des célébrations signifie la communion des archevêques avec le Pape, successeur de Pierre. En cette circonstance, François a prononcé une très vigoureuse homélie sur sa vision de la mission de l’Eglise aujourd’hui.

Tout comme les apôtres Pierre et Paul, emprisonnés par les autorités locales, furent libérés de leurs chaînes par l’Esprit du Seigneur, François rappelle que « nous aussi, comme disciples du Seigneur et comme Communauté chrétienne, nous sommes appelés à nous lever en hâte afin d’entrer dans le dynamisme de la résurrection et nous laisser conduire par le Seigneur sur les routes qu’Il veut nous indiquer. »
François veut rendre à l’Eglise son dynamisme missionnaire. Il veut vaincre les résistances qu’elle porte en elle. « Parfois, en tant qu’Église, nous sommes submergés par la paresse et nous préférons rester assis à contempler les quelques choses sûres que nous possédons, au lieu de nous lever pour jeter le regard vers des horizons nouveaux, vers la mer ouverte. Nous sommes souvent enchaînés comme Pierre dans la prison de l’habitude, effrayés par les changements et liés aux chaînes de nos coutumes. Mais l’on glisse ainsi vers la médiocrité spirituelle, on court le risque de "vivoter" y compris dans la vie pastorale. L’enthousiasme de la mission s’affaiblit et, au lieu d’être signe de vitalité et de créativité, on finit par donner une impression de tiédeur et d’inertie. Alors, le grand courant de nouveauté et de vie qu’est l’Évangile – comme l’écrivait le père de Lubac - devient dans nos mains une foi qui « tombe dans le formalisme et dans l’habitude, [...] une religion de cérémonies et de dévotions, d’ornements et de consolations vulgaires [...]. Un christianisme clérical, un christianisme formaliste, un christianisme éteint et endurci » (Le drame de l’humanisme athée. L’homme devant Dieu, Milan 2017, 103-104).
François a rappellé que l’actuel Synode « sur la synodalité » (ie : marcher ensemble), est un appel « à devenir une Église qui se tient debout, et non pas repliée sur elle-même, capable de regarder au-delà, de sortir de ses prisons pour aller à la rencontre du monde avec le courage d’ouvrir les portes »
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Il est donc facile d’entendre combien le Pape appelle une Église « sans chaînes et sans murs, dans laquelle chacun peut se sentir accueilli et accompagné, dans laquelle on cultive l’art de l’écoute, du dialogue, de la participation, sous l’unique autorité de l’Esprit Saint. Une Église libre et humble, qui "se lève en hâte", qui ne traîne pas, n’accumule pas de retards sur les défis actuels, ne s’attarde pas dans ses murs sacrés, mais qui se laisse animer par la passion pour l’annonce de l’Évangile et par le désir de rejoindre tout le monde et d’accueillir chacun ».

François témoigne ainsi de sa très vive conscience de ce que, dans sa mission, l’Eglise est pour tous ! Tous sont destinés à recevoir l’Evangile. Personne n’est à priori exclu de son message : il y a de la place pour tout le monde ». C’est donc le temps de l’accueil ! Et l’Eglise ne remplit pleinement son rôle qui si elle demeure en ces temps difficiles, l’espace de la consolation, du réconfort et de la tendresse.

François entend ainsi poursuivre la grande "bataille" toujours en cours dans l’histoire « parce que beaucoup ne sont pas disposés à accueillir Jésus, préférant suivre leurs intérêts et d’autres maîtres plus confortables, plus faciles, plus conformes à leurs volontés ». Il s’agit bien ici d’une vraie réforme spirituelle de l’Eglise qui ne dit pas son nom, une nouvelle conversion à la culture de la rencontre.

En invitant les nouveaux archevêques à ne pas rester des spectateurs passifs, François les a exhortés à l’humilité́, afin de ne jamais « … se sentir meilleur et empêcher aux autres de s’approcher ». Le processus synodal signifie que tous participent, personne à la place des autres ni au-dessus des autres. « Il n’y a pas de chrétiens de première et de seconde classe, tout le monde, tout le monde est appelé. »

Il reste encore une conversion à la puissance de l’Evangile. En effet, François rappelle que « l’annonce de l’Évangile n’est pas neutre, (…) elle ne laisse pas les choses telles qu’elles sont, elle n’accepte pas de compromis avec les logiques du monde. Reprenant les mots du Cardinal Martini, il fait sienne la vision du « combat » que mène la lumière de l’Evangile dans l’histoire contre l’obscurité du mal. Depuis que Jésus Christ est ressuscité, marquant le tournant de l’histoire, « une grande bataille a commencé entre la vie et la mort, entre espérance et désespoir, entre résignation au pire et lutte pour le mieux, une bataille qui n’aura pas de répit jusqu’à la défaite définitive de toutes les puissances de haine et de destruction » (C. M. Martini, Homélie Pâques de Résurrection, 4 avril 1999).

François pousse donc l’Eglise à se réformer de l’intérieur en se mettant au service du monde, afin de le « rendre plus humain, plus juste, plus solidaire, plus ouvert à Dieu et à la fraternité entre les hommes ».
Il redoute par-dessus tout le risque de « nous enfermer dans nos cercles ecclésiaux (…) Aidons-nous à être du levain dans la pâte du monde. Ensemble, nous pouvons et nous devons poser des gestes d’attention pour la vie humaine, pour la protection de la création, pour la dignité du travail, pour les problèmes des familles, pour la condition des personnes âgées et de tous ceux qui sont abandonnés, rejetés et méprisés. En somme, être une Église qui promeut la culture du soin, la tendresse, la compassion envers les faibles et la lutte contre toute forme de dégradation, y compris celle de nos villes et des lieux que nous fréquentons, afin que la joie de l’Évangile resplendisse dans la vie de chacun : tel est notre "combat". »

Face à ce défi, les tentations d’immobilisme sont nombreuses, en particulier « la tentation de la nostalgie qui nous fait regarder vers d’autres temps, meilleurs. » « S’il vous plaît, » implore François « ne tombons pas dans le "retour en arrière", ce retour en arrière de l’Eglise qui est à la mode aujourd’hui. » « Merci de cheminer ensemble, car ensemble seulement nous pouvons être semence d’Évangile et témoins de fraternité. »


Père Laurent Stalla-Bourdillon

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