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Léon XIV : la mission dans l’espace numérique

Au cœur de l’été, le Pape Léon XIV a rencontré des influenceurs catholiques réunis à Rome à l’occasion du Jubilé. Il leur a partagé sa vision du témoignage évangélique sur les chemins numériques. Il a ainsi rappelé que la mission de l’Eglise est avant tout « d’annoncer la paix au monde. La paix qui vient du Seigneur, qui a vaincu la mort, apporte le pardon de Dieu et montre le chemin de l’Amour. » Il a donc demandé à ces nouveaux missionnaires de s’engager « à nourrir d’espérance chrétienne les réseaux sociaux et les milieux numériques. »

L’univers numérique, en plus de son impact écologique, affecte aussi la vie psychique des utilisateurs-consommateurs. Les études ne manquent pas qui interrogent sur les effets psycho-sociaux des technologies. Léon XIV n’ignore pas que « la science et la technique influencent notre façon d’être et de vivre jusqu’à la compréhension de nous-mêmes et notre relation avec Dieu et avec les autres ». Il estime que « rien de ce qui vient de l’homme et de son ingéniosité ne doit mortifier la dignité de l’autre. » Les mots de Georges Bernanos en 1946 dans La France contre les robots, résonnent encore avec une force intacte à l’heure où la technoscience envahissante, prétend régenter toutes les dimensions de l’existence humaine : «  On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure  ». La vie intérieure, déjà fragilisée, s’épuise sous le flot des sollicitations numériques et des logiques algorithmiques qui homogénéisent les consciences et désincarnent les vies. Pourtant, au cœur de ces déserts intérieurs, le pape Léon XIV invite à un sursaut. Refusant à la fois le défaitisme face à la submersion numérique et la naïveté de ceux qui s’y engagent sans discernement, il exhorte les influenceurs catholiques à oser semer l’espérance sur les chemins numériques, en pensant d’abord à ceux qui souffrent, qui sont désespérés, ceux dont le cœur est vide, ceux qui ont perdu le sens de l’existence et le goût de la vie spirituelle. C’est la « chair souffrante du Christ » dans chaque frère et sœur, qu’il s’agit de rejoindre y compris dans les espaces numériques. Le Pape encourage ces témoins à être la voix de l’espérance en Jésus ressuscité, « jusqu’aux confins existentiels où il n’y a pas d’espoir ». Cette nouvelle génération, « Génération Léon » va édifier une Eglise missionnaire empruntant les routes numériques pour les éclairer de la lumière du Christ, « pour discerner ce qui est bon de ce qui doit être transformé et purifié ».

Particulièrement préoccupé par la naissance de l’intelligence artificielle, Léon XIV y voit la marque d’une nouvelle ère pour la société tout entière. Il songe avec gravité que la vérité sur Dieu et sur l’être humain est l’enjeu décisif de notre temps. La vérité sur la destinée humaine se défend en annonçant Jésus ressuscité, source d’espérance et de paix. L’Église, en tant que servante de la paix et de l’amour de Dieu, ne peut se tenir à l’écart de la société numérique. Elle doit l’embrasser avec audace pour partager le meilleur qui s’y trouve, pour qu’elle devienne un espace plus humain, plus fraternel. Il n’y a d’amour que parce que nous décidons d’en mettre. Telle est la force du témoignage de Jésus venu répandre l’amour du Père dans les cœurs. Dans l’amitié de Jésus, chacun peut devenir une voix de l’Amour sur ces routes numériques, trop souvent obscurcies, mais appelées à devenir des chemins de grâce.

Le Pape entend réfléchir à la cohérence de notre témoignage et pense que nous avons « le devoir d’élaborer ensemble une pensée, un langage qui donnent voix à l’Amour ». Ce processus commence par l’acceptation de sa propre pauvreté et la reconnaissance de son propre besoin de l’Évangile. Un témoin de l’Evangile vit de l’Evangile. Léon XIV souhaite « des réseaux d’amour, de partage gratuit, où l’amitié est authentique. » Des réseaux de vérité, « où aucune “bulle” ne peut couvrir la voix des plus faibles. Dès lors, chaque histoire de bien partagé sera le nœud d’un réseau unique et immense : le réseau de Dieu. »

Clairement pour Léon XIV, l’Église ne peut fuir ces espaces : elle doit y envoyer des témoins véritables, habités par l’Évangile, non pour se mettre en scène dans une logique d’auto-promotion, mais pour servir la vie intérieure des autres. Une telle présence suppose une forme de rébellion spirituelle contre un monde qui ne vénère que l’apparence et l’instant, au risque d’aplatir toutes les singularités dans une grisaille uniforme. C’est là, au cœur même de cette lutte silencieuse, que se joue le véritable combat pour l’humanité.

Les témoins de l’Évangile sur les routes numériques ne sont pas seulement les influenceurs en vue  : ce sont aussi tous les utilisateurs de ces technologies qui, par chacun de leurs choix, engagent leur liberté et leur responsabilité. Dans cet univers où les algorithmes favorisent la polarisation, l’individualisme et l’égocentrisme, témoigner de la lumière du Christ, c’est résister à ces logiques délétères pour devenir artisans de communion. Pour combattre les fausses nouvelles, il ne suffit pas de réagir. Il faut être habité intérieurement par la beauté et la clarté de la Vérité. Cela suppose un cœur centré sur le Christ.


Père Laurent Stalla-Bourdillon

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