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Pentecôte et sciences

Science et sagesse

Alors que l’humanité n’en finit plus de se protéger des vagues du coronavirus, les sciences sont sommées de tenter de prédire l’avenir, de prévenir du danger et de guérir les malades. La confiance dans le pouvoir des sciences peut-elle se substituer complètement à la foi en Dieu ? Que peut la scientia sans la sapientia ? Que peuvent les découvertes scientifiques sans la sagesse qui les ordonnent au bien de tous ? Notre époque de haute technicité scientifique appelle un surcroit de sagesse. La fin de la pandémie pourra bien signifier la sortie de la crise d’un point de vue viral, l’humanité n’en sera sortie qu’à la condition d’avoir effectivement compris ce qu’elle vient de vivre et pourquoi. Elle est un appel à ce que les sciences, et plus largement les consciences politiques, retrouvent la perspective de l’Homme. L’Homme, c’est-à-dire ce que la nature humaine a de spécifique, qui la distingue de tous les autres vivants sur la terre. Quel est le sens de cette « nature humaine » commune à l’homme et la femme, réunissant les peuples de toutes langues, de toutes couleurs de peau et toutes les cultures ? De quoi l’Homme est-il le nom ? Quel est son avenir ?

Nature humaine et esprit

La fête de la Pentecôte s’offre comme une réponse à ces questions essentielles. A l’origine de la fête juive de la Pentecôte, se trouve la fête des moissons. Lorsque la terre donne ses fruits, les prémices des récoltes sont offertes à la divinité. L’Homme se découvre lui aussi une terre appelée à produire des fruits qui seront eux-mêmes offerts. Les fruits que produit la nature humaine sont amour, paix, bonté, justice, unité, fidélité et gratitude… La fête de la Pentecôte est le puissant rappel d’un trait spécifique de la nature humaine : de par sa nature spirituelle, l’humanité doit produire dans ce monde et pour ce monde des fruits de nature spirituelle. Et de même que la vie biologique répond des lois invariantes du vivant, de même la vie spirituelle de l’être humain se gouverne par une loi de vie spirituelle. C’est le sens du don de la loi faite à Moïse. Seul l’Esprit de Dieu peut nourrir l’esprit de l’homme et lui faire produire ses fruits, dont le plus extraordinaire sera de concevoir l’inattendu de sa destinée bienheureuse. La Pentecôte est la restitution par Dieu à l’humanité de son chemin de croissance et de vie.
Si aujourd’hui, on reproche à un anthropocentrisme excessif d’avoir fait de l’homme le super-prédateur de la nature, c’est qu’une confusion s’installe dans la relation de l’Homme à son environnement quand se brouille au même moment la juste relation entre l’Homme et Dieu. L’humanité ne trouvera sa juste place dans l’environnement que si elle redécouvre qui elle est pour Dieu. La fête de la Pentecôte corrige l’anthropocentrisme de prédation pour un anthropocentrisme de responsabilité. L’humanité doit répondre de ce qui lui est confiée. Or, comment gouverner pareille splendeur, sans l’aide de celui qui l’a d’abord voulu et créé ?
D’abord gravées sur les tables données par Dieu à Moïse selon le livre du Deutéronome, les Paroles divines viennent réguler la vie du peuple des enfants d’Israël. Qu’il est sage de rappeler combien tout être humain vit de « paroles ». Doué d’esprit, il se nourrit de paroles, dont il métabolise le sens pour que son existence s’oriente vers un but. La Pentecôte est le rappel que la vie humaine n’est pas sans signification, elle n’existe pas pour rien. Au contraire, elle atteste que l’humanité est soutenue sur le chemin de son accomplissement. Et c’est en esprit que chaque personne est appelée à concevoir le sens bienheureux de ce don inouï et parfaitement gracieux de l’existence.

L’inspiration

L’homme existe en tant qu’être humain dès qu’il se découvre lui-même un être en devenir, sur la voie de son accomplissement. L’homme est celui qui sait, qu’il n’est pas complètement encore « achevé » ou « parfait » (au sens d’accompli parfaitement). Les sciences ont pour objet tout le monde visible. Mais le monde ne se réduit pas à sa visibilité, puisqu’il se recueille dans l’esprit de l’homme. Ce monde est invisiblement conçu, et réellement porté à l’intime de l’Homme. Il y a de l’invisible en ce monde que les sciences ne peuvent décrire mais que la sagesse contemple. Oserons-nous une nouvelle considération pour l’invisible en l’homme et par là, pour sa vraie grandeur ? Le souffle qui donne vie à l’esprit humain est d’une autre nature que le souffle de la respiration du corps. Le souffle de l’esprit procède d’une inspiration de la pensée. La Pentecôte célèbre la nouvelle inspiration dont l’humanité devient à nouveau capable : se gouverner selon l’Esprit de Dieu en vue de la vie en Dieu. La Pentecôte est la douce chaleur d’une illumination intérieure. C’est le don de Dieu offert à l’Homme.
La Pentecôte sauve la vie intérieure de l’Humanité de sa dissimulation dans les étoiles scintillantes des promesses du progrès. Elle la sauve de renoncer à sa propre destinée, de substituer sa vraie croissance à l’aveuglement de la performance de ses techniques. Elle atteste de l’ineffable beauté qui fait de l’humanité, le témoin d’un ordre supérieur à tout.
La Pentecôte rappelle chaque année l’assistance indéfectible de l’Esprit-Saint à l’humanité qui entre en alliance avec son Créateur. Elle se laisse engendrer et rénover intérieurement pour célébrer sa filiation divine. La modernité aura beaucoup perdu dans la mise à l’écart de la sagesse chrétienne, disqualifiée par les forts soupçons que – croit-on- les religions font peser sur la liberté humaine. La Pentecôte vient consoler un monde enfermé dans la jalousie de sa liberté supposant que Dieu est l’ennemi de l’Homme et que la religion est une aliénation de la raison. La Pentecôte réjouit en dévoilant la profondeur infinie de l’esprit de toute personne que Dieu seul vient combler.

La conscience

La Sagesse divine fait sa demeure en l’Homme. Elle est aussi vitale à son esprit, que l’air à ses poumons. La Pentecôte rend à l’homme sa liberté, en le libérant de tout autre raison d’être que l’amour. Toute personne à un rôle à jouer, toute personne a été voulue pour elle-même. L’Eglise a pour mission de dévoiler en chaque personne le divin trésor d’amour qui est déjà semé en elle. La Pentecôte insuffle à l’humanité la conscience vitale de la gratuité. Elle est en l’homme, l’écho parfait du souffle divin qui a gracieusement créé, c’est-à-dire par amour, et qui élève l’homme au-dessus de lui-même pour qu’il s’offre en retour.
En ce XXIème siècle, face aux effets de la pandémie, l’humanité est plus que jamais appelée à s’interroger sur la finalité même de son existence. Elle le peut, elle le doit car sans sagesse, l’histoire s’enfonce dans un monde tragique et sans issue. A la Pentecôte, se réalise le don de l’Esprit de Dieu à l’esprit de l’homme. Elle dévoile en toute personne, l’être mystique qui sommeille. La joie de cette fête de Pentecôte sera la nouvelle conscience spirituelle de l’humanité. Elle est là sur le point d’émerger pour repenser toutes les relations de l’humanité à son environnement.
Nos politiques sanitaires sont utiles et nécessaires mais sans l’esprit de sagesse, elles se limitent à un utilitarisme social. Remettre l’humanité en selle, suppose aussi de lui rendre l’élan qui la fait se porter vers son terme. N’avons-nous pas troqué – depuis longtemps déjà – la gratuité existentielle pour une complexité exponentielle ? Ne sommes-nous pas soumis malgré nous à une logique des boucles de contrôle qui nécessitent toujours de nouvelles boucles de contrôle ? Mais à qui confions-nous ultimement nos existences ? A qui en donnons-nous ultimement le contrôle ?
C’est à l’Esprit-Saint, esprit de la sagesse divine, que la fête de la Pentecôte nous invite à faire don de nos vies. L’Esprit-Saint console en même temps qu’il consacre notre capacité d’inspiration. Il diffuse la joie de renaître à la conscience simple et joyeuse de nous savoir aimés et appelés.
En ces temps, où montent vers Dieu, le cri des pauvres, que la sagesse divine fasse porter tous ses fruits à la science des hommes, et que l’Esprit de Dieu garde l’humanité dans l’unité et la renouvelle dans l’espérance.


Père Laurent Stalla-Bourdillon

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