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Pourquoi l’IA nous recentre sur l’essentiel

L’intelligence artificielle est tout à fait artificielle ! Il n’y a de vrai dans son nom que le mot « artificielle ». L’intelligence ne se produit pas, elle ne se réplique pas. Elle est ou elle n’est pas selon la nature des choses. Elle n’existe qu’en des êtres dont la nature est aussi spirituelle. L’intelligence a une finalité qu’on ne peut discerner dans les machines.
Rappelons avant tout que l’IA est une illusion pour nos sens, car elle est produite par des algorithmes probabilistes et des cadres mathématiques formés sur des montagnes de données. Elle peut imiter le langage et la logique sans saisir leur sens, comme une tablette de cire est incapable de comprendre le sens de ce qui est gravée sur elle. Le contenu gravé ne lui est d’aucune utilité. Le fonctionnement des grands modèles de langage (LLM) repose sur la décomposition des données en unités (tokens). Ils prédisent chaque mot suivant sur la base des schémas statistiques appris au cours de la formation, appelé entrainement. Les résultats peuvent être cohérents, mais le processus sous-jacent est seulement probabiliste et jamais cognitif. Il s’agit de textes issus de prédictions à une échelle sans précédent. Nous sommes désormais face à des textes, à des paroles machines, qui ne sont plus le fruit de la pensée humaine, mais face à une illusion de la pensée. La question devient : pouvons-nous vivre dans un univers d’illusions ? Pouvons-nous quitter le réel ? Certainement pas, nous allons donc toujours avoir besoin de nous appuyer sur le réel, qui est un donné et non le fruit de notre production.
Notre culture ne doit plus chercher à confondre les performances informatiques et l’intelligence, car l’IA échappe aux dimensions humaines : la profondeur émotionnelle, le jugement éthique, l’intuition… finalement, elle nous pousse à repenser ce qui compte vraiment.
La véritable intelligence ne naît pas de la biologie (que l’on essaye de répliquer avec les réseaux de neurones), mais elle naît seulement de l’intelligence divine. Le hasard ne produit pas une chose aussi fantastique que l’intelligence, sans but précis. L’intelligence est finalisée. Elle se reçoit nécessairement d’une intentionnalité antérieure qui lui donne sa finalité. Il n’y a donc d’intelligence humaine que par l’effet d’un don premier, qui, selon les tenants de la Révélation biblique, nous fait « à son image », capable de communiquer d’intelligence à intelligence. C’est donc bien la finalité de l’exercice qui détermine l’intelligence : en vue de quoi suis-je intelligent ? Par quoi est finalisée ma capacité de penser ? C’est toujours à la direction que l’on prend que l’on discerne la présence de l’intelligence. Ce qui donne du sens, de la signification est aussi ce qui décide de notre direction.
Une machine ne peut ni pleurer la mort d’un enfant, ni tomber amoureux, ni s’asseoir avec un ami en silence, ni contempler un coucher de soleil ou lutter avec un dilemme moral. C’est dans l’instance invisible de l’âme que siège l’intelligence humaine. C’est en elle que se forme l’amour. L’amour est ce pourquoi nous sommes intelligents. Et l’IA connaîtra beaucoup de choses, mais jamais la réalité transformante de l’amour. C’est cela notre vrai « image et ressemblance de Dieu » qu’évoque la Bible. L’amour est une invitation au don de soi, et surtout un appel à l’accomplissement de soi, car nous ne sommes pas nés achevés. L’intelligence humaine est au service de l’amour qui seul nous accomplit dans notre humanité.
Une machine ne s’accomplit pas, elle n’est pas attendue dans l’éternité bienheureuse. Pas de joie, pas de honte non plus, parce qu’elle n’a pas d’avenir. Le devenir est l’essence de l’intelligence humaine et de l’intelligence divine. Le devenir est le principe du vivant. La machine est sans vie et reste sans nécessité de s’accomplir dans un « devenir », dans une forme finale.
Pour l’être humain, c’est la conception, en lui, de la vérité toujours plus belle et grande que ce qu’il a déjà conçu, qui le conduit peu à peu à sa forme terminale et magnifique. L’intelligence de l’humain est faite pour comprendre ce qui est en elle, contrairement à la tablette de cire qui ne comprenait rien de ce qui était écrit sur elle. L’humain lui comprend ce qu’il est et trouve sa joie dans la compréhension de sa vie. C’est l’intelligence à l’œuvre, qui prend le nom de la sagesse. Elle est nécessairement vécue et ne peut pas être simulée ou synthétisée par des machines. Les machines ne sont pas vivantes. Et aucun ensemble de données, aussi vaste soit-il, ne peut leur donner la vie intérieure.
L’intelligence artificielle recèle un énorme potentiel de transformation des sociétés. Il est déjà en train de remodeler notre façon de vivre et de travailler. Il aide à diagnostiquer la maladie, à gérer l’information et à rationaliser la productivité. Il s’agit là de contributions très précieuses. Mais plus que cela l’IA vient providentiellement nous aider à garder le sens de notre humanité. Sa véritable valeur dépend de notre volonté de voir clairement ce qu’elle est, et ce qu’elle n’est pas. L’IA est un outil, elle n’est pas une personne. Comme tous les outils, sa valeur dépend de la sagesse de ses utilisateurs. Ces technologies renforceront notre humanité à condition de ne pas tenter de la remplacer.
Ne soyons pas si éblouis par ces machines. Émerveillons-nous de ce que nous sommes et sommes appelés à devenir. Chacun est unique et irremplaçable. Aucune machine ne pourra jamais égaler la valeur d’un seul être humain. Seul un humain peut le dire, et le vivre en faisant de sa vie un don pour les autres.


Père Laurent Stalla-Bourdillon

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